Croix de La Mine La compagnie Surcouf En juin 1944, la France devient le théâtre d'une opération militaire sans précédent : l’opération Overlord qui a pour but de libérer l’Europe du joug nazi. Le 6 juin, les Alliés débarquent en Normandie. Ce même jour, des résistants entrent dans la ville de Saint-Amand-Montrond, dans le Cher, occupée par les allemands. Mais dès le lendemain, l’occupant riposte pour encercler la ville. Le soir du 7 juin, les résistants commencent à évacuer pour éviter les représailles. Le convoi quitte la ville avec des otages : quatorze miliciens dont six femmes. Parmi elles, Simone Bout de l'An, épouse du secrétaire général de la milice, fondée le 30 janvier 1943 par le gouvernement de Vichy. La milice a pour vocation de lutter contre la résistance, contre les Juifs et contre les opposants au régime. Le convoi roule la nuit, passe par Chateaumeillant et s'arrête, au petit matin du 8 juin, à Bonnat. Arrivés à Guéret, prise par les résistants le 7 juin, les miliciens hommes et femmes sont conduits à la maison d'arrêt. Mais le 9 juin, Guéret est reprise par l’occupant. La route nationale 140, en direction du sud, se couvre alors de véhicules. Les maquisards du Cher suivent le repli des résistants creusois vers le sud de la Creuse. Trop nombreux, le groupe est alors scindé en deux : l’un sous l’autorité du capitaine Blanchard, surnommé le capitaine Surcouf, l’autre avec le lieutenant Hubert, appartenant aux FTP.
Dans le hameau de Mérignat, isolé à 6 km au NO de Bourganeuf, les hommes de Blanchard s’installent dans les granges des deux fermes qui composent le hameau, le château attenant recevant l'état-major. Les prisonniers, quant à eux, sont enfermés dans la chapelle. La présence des résistants nécessite une organisation logistique conséquente. Il faut notamment nourrir une centaine d’hommes : les fermes voisinent s'en chargent et les résistants achètent des animaux, des vivres aux agriculteurs voisins tout en bénéficiant également de parachutages de vivres. Les objectifs de la compagnie Surcouf sont multiples : – effectuer des patrouilles dans les environs de Mérignat – surveiller l'axe routier de la départementale 8 et le pont de Murat – apprendre le maniement des armes reçues par la voie des airs : les jeunes, nouvellement recrutés doivent s'initier au tir, au lancement des grenades... – assurer la sécurité dans les opérations de parachutage à Nadapeyrat, sur le terrain nommé « Pension ». Cette photographie représente un abri destiné aux résistants de la région, constitué de contenair et de toile de parachute. Annoncés par le message codé « Robespierre se rasera six fois », le 3 juillet 1944, 6 avions britanniques larguent 72 contenairs et 50 colis en osier, comme le révèle ce document. 156 mitraillettes Sten, 20 révolvers, 216 fusils, 936 grenades sont notamment livrés et un contenair en vol se serait ouvert. Mais le 16 juillet, une partie du stock tombe aux mains des allemands et de la milice. Les objectifs de la compagnie Surcouf restent inchangés jusqu'au 17 juillet date à laquelle la pression de la brigade Jesser se faisant de plus en plus forte, Blanchard décide de regagner le Cher à pied, par étape, en bénéficiant d’estafettes lui indiquant le chemin à suivre. Cette brigade Jesser est une formation militaire allemande composée d’éléments de la Wermarcht, de SS et de différents services de police. Elle est chargée d’organiser la répression et la destruction des maquis de la Creuse et de la Haute Vienne. Le 18 juillet, la section se rassemble avec bardas et armes et prend la direction du pont de Murat. Les camions sont alors garés sous d'épais feuillage. La compagnie est alors scindée en deux pour brouiller les pistes : la section du lieutenant Chaillaud est en charge des prisonniers. Depuis le 23 juin, la femme Bout de l’An et les miliciennes ont été échangés contre une soixantaine d’otages de Saint- Amand, arrêtée par la milice après la reprise de la ville. Sacs chargés, Blanchard et ses hommes, quant à eux, s’engagent dans une marche éprouvante sur des chemins accidentés. A la tombée du jour, les hommes installent leur campement dans un lieu feuillu constitué de taillis, à quelques dizaines de mètres d’ici. Mais cet espace est peu propice à la défense et proche de la route. Le matin du 19 juillet, le lieutenant Van Gaver s'enfonce dans une allée à la tête d'une patrouille et c’est alors que la mitraille crépite. Les nazis attaquent au mortier et des grenades sont jetés. Les FFI ripostent mais sont pétrifiés par la mitrailleuse portative et par les allemands qui surgissent du taillis et du champs de blé. Le bilan est lourd : le capitaine Blanchard, Van Gaver et six hommes tombent sous la mitraille.
Après plusieurs heures, une soixantaine de prisonniers monte dans des camions, traverse des hameaux déserts et parvient devant la mairie de Bourganeuf. Un interrogatoire a lieu à la mairie sur le lieu de parachutage des armes, sur le nom des chefs de la résistance... Enfermés dans la tour Zizim, les prisonniers sont embarqués, le 20 juillet, dans des camions débâchés : sur le toit de la cabine du conducteur, un soldat armé d'une mitraillette assure la sécurité. Après une journée de route à une vitesse réduite, ils parviennent à Aubusson et passent la nuit privés d’eau et de nourriture. La vitesse est toujours réduite : on attend les estafettes par crainte d'une attaque. Le 21 juillet, ils arrivent à Clermont-Ferrand et sont internés au siège régional de la milice. Installés dans des wagons de 3 ème classe, ils partent pour une destination inconnue et traversent Le Creusot et Dijon. Transférés dans des wagons à bestiaux, dans des conditions inhumaines, ils arrivent le 6 août à la gare de Cologne. Certains sont alors acheminés à Stolberg pour participer à l’effort industriel allemand en travaillant dans l’industrie métallurgique. Le 12 septembre, les Alliés enfoncent le front et la ville doit évacuée. Ils sont alors dirigés vers Cologne et sans le savoir vers le camp de travail de Buchenwald. Parmi les déportés treize périront dans les camps.
Depuis la Libération, une cérémonie rend hommage aux victimes autour de ce monument érigé en 1946. Dans les jours qui ont suivi ce massacre, une inhumation provisoire a eu lieu à quelques dizaines de mètres d’ici, dans des cercueils réalisés par des menuisiers de Saint-Dizier-Leyrenne. Ce respect dû aux victimes a été immortalisé par un jeune garçon Germain Gayaudon qui avait reçu en cadeau de communion un appareil photographique. Le site a été sacralisé par une palissade hérissée en bois et les tombes ont été matérialisées par des croix de bois surmontées des casques des victimes, visibles sur la Photographie ci-dessous. Les corps seront rendus aux familles en septembre après la libération du territoire creusois. Merci aux élèves de la Classe de 3ème de Défense du collège Jules Marouzeau à Guéret pour leurs travail, guidés par leur enseignante. |